29.11.12

Dîner après la fermeture du restaurant {en mode Tati}


20h47, vin blanc biologique chilien
{ on n'a pas supporté qu'elle se mette à l'avant du bateau }








22h23, Chablis
{ si tu savais le nombre de névroses que je vais te raconter cette nuit }













01h76, Reuilly
{ notre projet prochain c'est le tour du monde en pignon fixe }














02h03, Whisky japonais
{ il m'est rentré dans le cul, ça m'a coûté 20 000 € }










*





Tati's Monsieur Hulot character wanders aimlessly through a corporate maze, baffled by the antiseptic neatness he encounters all around him. With the film's spare dialogue almost entirely relegated to the level of background chatter with little meaning, Tati allows his images to carry the film's subtle but often hilarious humor.

13.11.12

Un vernissage en mode Tati




j'étais trop triste, ils étaient en plastique. Je te jure ça m'a trop miné }



moi, Lavier, j'aime bien que la bagnole rouge, ça me rappelle Crash de Cronenberg }



{ mon corps insolent, mes appas tracés au compas }







t'es trop victime du marketing, c'est pas ça la vraie recette, déjà t'as pas de menthe }





 

 
 
{  le type qui a sauté du ciel moi je pensais qu'ils allaient le crasher pour faire plus de buzz }





*




La grande trouvaille de Tati est la bande sonore. Elle donne au film son épaisseur temporelle. Ce n'est pas un magma indistinct comme on le prétend parfois, mais des dialogues, cris, bruits et sons précis qui sont distribués dans des rapports d'intensité déformés, dont aucun n'est placé en situation dramatique. Des bruits intempestifs prennent un relief absolument faux. A un matériau sonore authentique se surimposent des sons artificiels constamment décalés. De là naît l'inanité sonore de ce mode cependant humain. L'aspect physique de la parole est impitoyablement mis en évidence. Les mots se promènent tous nus avec une indécence grotesque.

22.10.12

Mon cours de cuisine thaï


j'arrive en avance devant l'immeuble.
 
au niveau de la rue, une vitrine avec des clignotants roses et le nom Libellules d'Orient
derrière la caisse, une asiatique seins très remontés dans une robe fourreau à dragons
massages chinois, thaÏ et indien, j'entre pour demander la différence
elle me sourit puis me bat froid quand je lui pose ma question sans donner suite

bref, je monte pour mon cours de cuisine
j'entre dans une chambre de bonne de 10m2
accueilli par une jeune femme en costume traditionnel,
et un homme d'environ 60 ans,immense, en costume 3 pièces, 

à la moustache et aux favoris rouges,
me serrant la main de ses petits doigts boudinés
"bonjour je suis le partenaire business de Mireille"

glups
j'enfile mes chaussons genre j'ai des pieds de 3 m3
dans la pièce, une table dressée entre le clic clac du couple et la penderie en plastique fleuri
moquette verte

 
une autre élève est déjà là
dame 50 ans, cheveux ras platine, grosses boucles d'oreilles diams
énorme poitrine moulée dans une marinière et blanche motif ancre en strass

pantalon blanc, petit chien jaune sur les genoux

je m'assois à table
la dame en marinière me regarde et met la main sur la bouche
'oh mon dieu vous êtes cet acteur, là, mais si... ne niez pas"
et pendant les 2h30 du cours elle va me regarder en coin 
en cherchant qui je peux bien être 

le 3ème et dernier élève arrive
un montrealais à la nuque raide, timide comme pas permis, 
en autocontact et en questions destinées à se rassurer en permanence
la dame à l'ancre qui nous raconte combien elle admire sarkozy qu'elle croise à sa pizzeria
le canadien qui me pompe le mou avec son histoire d'épluchette : "c'est une fête avec de l'épi dingue."
comment, lui réponds-je, l'épi dingue ? 
nan, l'épi dingue
ah d'accord


(en fait c'est l'épi d'Inde je crois enfin bref le maïs)

---

le "cours" commence
nous suivons tous les 3
Mireille dans la cuisine de 1, 5 m2
tentant de voir par-dessus son épaule ce qu'elle fait
elle mélange des sauces dans un tupperware
nous demande à chacun de couper un concombre en tranches
ce sera notre seule action concrète

sinon nous la regardons préparer 4 plats en même temps
en finissant par perdre le fil totalement
le Canadien et la dame dénigrent le Japon
"pas de fromage les pauvres et puis les typhons
et puis toujours stressés"
puis avec le "manager"
évoquent l'histoire de France, des rois, puis des 
grands acteurs français "Jean Lefevre"

Enfin
Mireille tout en sueur dans son costume nous fait aller à table
nous apporte les plats, 
nous déjeunons tous les 5 sur cette table, dans cette pièce surchauffée, 
sur la moquette verte et épaisse, 
en écoutant la dame demander si oui ou non les geishas 
sont des prostituées

j'aurais mieux fait d'aller faire un tour chez les
Libellules d'Orient

1.10.12

Epouse ou concubine


"Tu sais, Maurice, quand il t'a quittée pour venir avec moi, j'ai vraiment flippé.
- Ah oui ? C'était pas ce que tu voulais ?
- Non, à l'époque j'aimais bien être dans le rôle de la maîtresse. Le côté gentil, attentionné, les restos sympas, c'était pour moi. Comme avec toi c'était la routine, tu vois...
- Ben ouais, c'est le principe. Et du coup depuis qu'il vit avec toi ?
- La routine. Mais là je crois qu'il me trompe.
- Classique. S'il m'a trompée, c'est normal qu'il te trompe aussi. C'est qui la fille ?
- La fille ? C'est toi non ?
- Oui, c'est bien moi. Comment t'as deviné ?
- Pas difficile, je l'ai suivi jusqu'à chez toi.
- Tu es triste ?
- Non, parce qu'il était devenu chiant. Il est cool au début, Maurice. Ensuite il tourne en rond et se lasse alors il va courir la gueuse.
- La gueuse ? Tu dis ça pour moi ?
- Non, c'est juste une expression. J'ai une idée. Tu le gardes jusqu'à ce qu'il se languisse de moi, puis je la garde jusqu'à ce qu'il se languisse de toi. Et ainsi de suite. On se le prête pour le meilleur. Ok ?
- Pas con. Justement là je sens bien qu'il ronge un peu son frein. Tu l'appelles ?"


4.9.12

La faune de Paris # 5 / Raphaëlle, ministre



Depuis qu'elle sait que la fin du monde est pour bientôt,
Raphaëlle ne s'embarrasse plus d'un tailleur pour participer au conseil des ministres.

30.8.12

La faune de Paris #4 / Doudoune et Shishi ou la théorie des 2 hémisphères





























"- La théorie des deux hémisphères du cerveau, tu y crois, toi, Doudoune ?

- C'est une connerie, Shishi. Elle séduit tout le monde car elle est simpliste et qu'elle cristallise une représentation bipolaire du monde. Dans les années 70, à l'heure où le mouvement hippy recherchait des méthodes d'épanouissement, de nouveaux gourous ont exploité le filon symbolique des deux cerveaux, présentés comme le yin et le yang. A gauche le langage, la raison, l'esprit d'entreprise. A droite, la perception de l'espace, l'affectivité, la contemplation.  On ne s'étonnera donc pas que cette théorie soit devenue le creuset de toutes sortes de spéculations plus ou moins mystiques.

- Ah oui, mais nous pourtant, on est deux amies, totalement différentes, toi tu es logique et moi intuitive.

- Oui, mais personne ne nous a encore traité de "cerveau", si ? Tu trouves qu'on a des gueules d'hémisphères ou quoi ? 

- Ben quand même, moi quand je fais un effort de logique, comme trouver mon chemin sur un plan de métro, je sens plus mon hémisphère gauche que le droit.

- Ah d'accord.

- Et puis aussi on a toujours un sein plus gros que l'autre, non ? Ils sont pareils mais différents à la fois, non ?

- Et donc ?

- Ben donc si la théorie marche pour les seins, pourquoi elle fonctionnerait pas pour le cerveau ?"

Entendu à une terrasse de café Paris 10ème
Les prénoms ont été changés

24.7.12

Orgasme - Une série (suite)



"Pour moi, l'orgasme est un territoire inconnu. Personne n'a su me le donner. Cela me donne l'impression d'être enfermé dans un cocon, de stagner dans l'évolution sexuelle. C'est très frustrant d'écouter tout le monde en parler sans savoir ce que c'est à deux. "  

 Rikita



















"Juste l'impression d'être une rock star pendant une seconde." Flavio




















"Avec mon mec, nous sommes tellement trop attentifs l'un à l'autre
que nous ne réussissons jamais à atteindre l'orgasme en même temps, c'est un peu frustrant."

Sélène






16.7.12

Edmond


Assis sur une marche à côté de l'église, Edmond. Américain, arrivé en France avec la guerre, il s'installe ensuite dans une chambre de bonne rue Bonaparte. Traducteur d'ouvrages d'art, il gagne bien sa vie, se marie avec Olga. Ne sortant jamais de Saint Germain des Prés sauf pour quelques séjours en Normandie, il affectionne les soirées entre amis, les conversations passionnées sur la politique, la littérature, les arts.

Aujourd'hui, ses amis ont disparu, un par un. Olga aussi.

Pour s'occuper, il lit. Des philosophes, principalement. Et après le déjeuner, il sort fumer. En bourrant sa pipe, il rev(o)it toutes ces discussions. Les yeux fixés sur ses pensées, il ne voit pas les passants, taches floues et colorés sur fond gris. Un sourire aux lèvres, il repense à son ami Ramezan, intellectuel fin et puissant, pessimiste et fataliste, heureux seulement lorsqu'il évoquait la Perse, ses écrits, ses enluminures, mais si invariablement accablé en fin de dîner par le poids des choses et l'angoisse de l'avenir qu'il se taisait après avoir lancé sur un ton désespéré : "n'oubliez jamais, mes amis, que les plus grosses couilles sont toujours au service d'une bite." Encore maintenant, Edmond s'interroge sur le sens de la formule.



22.6.12

Hortense


Je l'ai rencontrée à un vernissage.
Déprimée.
Le motif ? Son mec, en voyaged'aff à l'autre bout du monde, lui avait demandé par bbm ce qu'elle aurait envie de faire si la fin du monde était pour demain. Elle: pas d'idée. Se dit que la question est menaçante. Elle ne sait pas ce qu'elle ferait. Mais alors vraiment pas du tout. Et ça l'angoisse grave. La ferait presque vomir de peur.

15.6.12

Orgasmes - Une série



"Le seul moment où on s'entend bien" Géraldine et Hector
"The only moment we understand each other"














"Une danse débridée où je fais tout ce que j'ai toujours voulu faire, sans retenue" - Dina















"Moi,  je n'arrive jamais à l'orgasme, car je m'ennuie, donc je simule.
Et ne pensez pas que c'est rare pour un mec" Hugues

"I can't reach orgasm. So I have to pretend. Don't think it's unusual for a guy." Hugues

















"Ma partenaire devient une créature surnaturelle capable de choses incroyables" Liv

"My partner becomes a supernatural creature doing amazing things" Liv

















 "Une plongée dans les abysses. Je deviens une sirène." Joséphine

"I become a mermaid in the hidden depth of oceans" Joséphine
















"Quand nous l'atteignons ensemble, c'est comme si on était une jungle chaude et humide"
Fredo et Katy

"When we reach it together it's like we're a hot and wet jungle" Fredo and Katy














"Une intense déflagration qui me détruit 1000 000 de neurones d'un coup" Hilde

"A huge explosion that destroys me 1000 000 neurons at once" Hilde
















"J'ai l'impression que des poissons roses jaillissent de ma tête" Félicie

"I feel that pink fishes pop out of my head" Felicie



 
Un jour, une amie lectrice m'a demandé si je pouvais représenter la sensation qu'elle éprouvait à l'instant même de l'orgasme. C'était le premier dessin de la série (Félicie, ci-dessus). Si vous aussi vous voulez participer et voir le dessin de votre 7ème ciel, vous pouvez laisser un commentaire à ce message ou m'envoyer un mail. Anonyme ou sous pseudo bien sûr, je me charge de vous inventer un visage et un nom. La série peut être assez intéressante, comme une sorte d'album, d'herbier.
One day, a reader asked me if I could represent the feeling she experienced at the moment of orgasm. The result is the drawing above (Félicie). If you also want to participate and see the design of your climax, you can leave a comment to this post or email me. Anonymously or nickname, of course, I'll invent you a face and a name. This orgasmic serie can be quite interesting, as a sort of album, herbarium.



8.6.12

La serviette de la masseuse


Je découvre la petite pièce à la lumière tamisée où va se dérouler le massage de 55 mn. Les murs taupes, laqués me semble-t-il, une cabine de douche aux grands carreaux dans un coin. Et au milieu, la table de massage, recouverte d'un drap de papier. 

La masseuse, souriante et professionnelle, me désigne la patère et les cintres où poser mes affaires, puis un petit objet de papier plié dans un film plastique, posé au milieu de la table : "Et si vous voulez, un slip jetable". Je lui réponds en souriant que non je préfère rester en caleçon, si cela lui convient. Elle acquiesce d'un coup de menton et me dit que le massage commence par la partie avant. J'en déduis que je dois m'allonger sur le dos après m'être déshabillé. Je l'attends donc, en caleçon, les mains le long du corps, les yeux fixés sur le plafond constellé de petites diodes, façon constellation.

Toc toc. Elle entre et me demande : "Vous voulez une serviette ?", en tenant une serviette éponge taupe entre les mains, au-dessus de mon bas-ventre. Je ne saisis pas immédiatement le sens de sa question et réponds "Euh, non, moi ça ne me dérange pas, merci". Elle replie donc la serviette, s'enduit les mains d'huile et commence à masser mes orteils. 

Et là je réfléchis. Pourquoi m'aurait-t-elle proposé cette serviette, sinon pour masquer une éventuelle érection, due à ses manipulations et gênante pour elle comme pour moi ? Si c'est le cas, qu'a-t-elle bien pu penser de ma réponse : "moi ça ne me dérange pas, merci" ?